Le château de Rémersdael

 
 

On ignore à quelle époque fut construit le château de Rémersdael, lequel se dressait à une centaine de mètres au sud de l'église actuelle. Comme les autres châteaux de la contrée, il était entouré de fossés et relié par un pont‑levis à la cour de la ferme. Incendié par le duc Jean 1er de Brabant lorsqu'il vint ravager les biens des Scavedris dans le Limbourg, il fut restauré dans la suite.

Le château de Rémersdael constituait, avec la ferme joignante, un grand fief, d'une étendue de 58 bonniers, soit environ 50 hectares, qui relevait de la seigneurie de Fauquement. C'est devant la cour féodale de cette seigneurie qu'à chaque changement de possesseur devaient se faire les reliefs du fief. C'est grâce à leur inscription dans les registres de cette cour que l'on connaît les personnages entre les mains desquels il a successivement passé. Il est à remarquer que l'enregistrement de ces reliefs ne commence qu'en 1381, année où le duc Wenceslas de Brabant et de Limbourg, entra en jouissance de la seigneurie de Fauquemont.

A cette époque, d'après les reliefs, le château de Rémersdael appartenait à Scheiffart de Houffalize et Alard van der Smitzen de Hagelstein. On peut se demander si ceux-ci ne doivent pas être identifiés avec Scheiffart et Alard de Rémersdael, qui avaient acquis l'avouerie Le même personnage était alors désigné tantôt du nom de son lignage, tantôt d'après le lieu, de sa résidence ou encore d'après l'un on l'autre de ses biens.

Le fief passa ensuite à Jean de Tzevel, qui avait épousé Catherine de Rémersdael, fille d'Alard. Vers le milieu du XVe siècle, il est relevé devant la cour féodale par Renier van der Smitzen. Le nom de cette famille se présente aussi sous les formes van der Smitten ou delle Smet. Renier était vraisemblablement le frère d'Alard, échevin d'Aix‑la‑Chapelle, dont la fille Marie épousa l'écuyer Frambach de Gulpen, drossard du comté de Dalhem.

Leur fils Thierry, seigneur de Rémersdael, s'unit à Agnès de Berlo, qui lui apporta le château d'Avionpuits près d'Esneux. De ce mariage naquit Marie de Gulpen, qui s'allia à Michel d'Eynatten, seigneur d'Obsinnig.

Le 9 janvier 1514, le chevalier Thierry de Gulpen de Rémersdael, son frère Henri de Gulpen, gouverneur de Limbourg, et son gendre Michel d'Eynatten règlent avec l'abbesse du couvent de Sinnich et le prieur de Rolduc, délégué de ce monastère, auquel étaient soumises les religieuses au point de vue spirituel, les conditions auxquelles sera admise Marie de Gulpen, fille de Thierry.

Après la mort de ce dernier, survenue le 18 juin 1518, Rémersdael demeura quelques années dans la possession de la famille de Gulpen, puis passa en 1537 à Arnold d'Eynatten, fils de Michel et de Marie de Gulpen. Sa sœur Cécile fut aussi religieuse au couvent de Sinnich. Il eut pour successeur en 1560 son fils Thierry, marié à Catherine de Strythagen, fille de Jean, seigneur de Clermont. Ces époux donnèrent le jour à Henri d'Eynatten, qui releva le fief de Rémersdael le 28 mars 1602.

Une sentence rendue le 30 juin 1615 par le Souverain Conseil de Brabant termine un procès engagé entre le monastère de Sinnich et Henri d'Eynatten, au sujet de la propriété d'un petit bois, appelé Roobosch, touchant au bois de Rémersdael, près de la route de Limbourg à Maestricht : le couvent peut disposer de ce bois et y faire travailler des ouvriers comme et quand il lui plaît.

Le 4 juin 1619, le relief est fait au nom de Guillaume d'Eynatten, fils de Henri, officier de cavalerie, qui fut tué le 6 mai 1622 à la bataille d'Urlach dans le Palatinat. Rémersdael passa ensuite à son frère Jean‑Henri, époux de Sybille de Goltstein, décédés respectivement en 1663 et 1678. Leur dalle tumulaire, qui se trouvait dans l'ancienne église, est encastrée dans le pavement du caveau de la famille de Furstenberg. Deux des filles de Jean‑Henri, Eulalie et Catherine, furent chanoinesses à Sinnich et une troisième, Anne‑Marie, s'allia à Adolphe Colyn, seigneur de Beusdael. Leur frère, le baron Guillaume‑Thibaut d'Eynatten, épousa sa cousine Catherine‑Elisabeth d'Eynatten d'Obsinnig et réunit ainsi en sa possession les deux seigneuries.

Son fils, le comte Frédéric d'Eynatten, personnage le plus important du lignage (à qui une notice spéciale sera consacrée), céda ‑ ou fit semblant de lui céder ‑ une partie de son domaine de Rémersdael au gentilhomme liégeois de Corswarem‑Looz, afin de lui permettre d'être admis comme membre des États du Limbourg. Le 27 décembre 1721, il vendit la seigneurie de Rémersdael et ses autres biens dans la région à la baronne Marie‑Anne‑Louise‑Thérèse de Hochsteden, qui épousa le baron Christian‑François‑Thierry de Furstenberg.

Extrait du Plan POPP.

Le cadastre du Limbourg établi en 1771 mentionne le château de Rémersdael avec ses dépendances et ses fossés (3 journaux 91 verges), le potager (l journal 45 verges), les prairies (21 bonniers 47 verges), les labours (26 bonniers 1 journal 90 verges) et quatre étangs (1 bonnier 1 journal 66 verges).

Le château a été démoli vraisemblablement an début du siècle dernier. La large porte d'entrée de la cour extérieure de la ferme est surmontée d'une toiture et accostée d'une petite tour basse carrée, offrant une meurtrière pour en défendre l'accès. La muraille en moellons de l'aile Nord des bâtiments a conservé de petites fenêtres avec barreaux et encadrement de bois et elle est percée de quatre meurtrières. Le passage qui la traverse entre deux arcades donne accès à la cour intérieure, s'ouvrant du côté du château disparu. La porte de l'habitation montre dans sa clef de voûte un écusson avec la date de 1652, rappelant une reconstruction faite par Jean‑Henri d'Eynatten, tandis qu'au-dessus de l'entrée de  la grange se voit le millésime 1865. Un des cinq étangs qui avoisinaient à l'Est le château subsiste encore.

Il n'existe à notre connaissance aucun document graphique représentant le château disparu, dont le souvenir s'est même effacé de la mémoire des habitants du village. Seule, l'appellation Huys, ‑ signifiant ici «manoir», ‑ qu'a conservée la ferme demeurée la propriété de la famille de Furstenberg, rappelle que là se dressait jadis le château de Rémersdael.

Des restes crédibles de l'ancien château?