Les biographies de Rémersdaelois

 
 

Joseph STRAETMANS

Né à Saint-Jean-Sart le 21 juin 1917 et décédé au Fort d'Aubin le 20 mai 1940.

Différents témoignages retrouvés dans les notes du Fort d'Aubin nous apportent des précisions sur le décès de Joseph STRAETMANS:

20 Mai 1940

14H56             Message à Battice pour assistance tz inf, Battice tire avec 120 et 75 sur Neufchâteau.

                        Bloc C2 est éventré, coups percent le local du phare et explosent dans la casemate tuant le soldat Straetmans et blessant grièvement le brigadier Denis.

                        Deux coups d ‘embrasure sur le 47.

Témoignage du Mdl. Lorent Jean, chef du C2 avec le Mdl. Bertholet :

                        Tirs très volent de l’ennemi sur le fort et le C2, un soldat du coffre MI (front II, III) à signalé des ennemis descendus dans le fossé et passant le long du mur du C2, probablement descendus dans l’angle formant C2 et contre-escarpe.

                        J’ai demandé au bureau de tir de renouveler les tirs d’appui qu’il m’avait donné auparavant, le Cdt. m’a répondu que ce n’était pas possible à ce moment.

                        Toutes les armes du front II, III étaient en action.

                        Une explosion c’est alors produite dans chacune des quatre embrasures.

                        Le soldat Straetmans à été tué au FM et le brigadier Denis mortellement blessé par le souffle au canon de 47, je ne me souviens pas si le canon a été refoulé dans la casemate.

                        Le bâtiment était rempli de poussières, de fumées et de débris, les portes étaient démolies, nous avons évacué le bloc.

Au moment où je descendais l’escalier, j’ai rencontré le lieutenant Luyssen et le Mdl. Dechesne qui montaient et venaient voir ce qui se passait au bloc.

                        Je suis remonté peu de temps après et ai rencontré dans l’escalier le Lt. Luyssen qui descendait Denis en le portant, j’ai demandé si on ne pouvait pas enlever Straetmans, le Mdl Duchesne m’a dit que c’était inutile, qu’il était mort, de plus c’était trop dangereux à cause des tirs ennemis sur le bloc.

                        Suite 14H56 :                                                                           

                        Au bureau de tir le Cdt. m’a donné l’ordre de réoccuper mon bâtiment, je suis allé avec un homme au pied du puit où se trouvaient le LT. Modave et le LT. Luyssen.

                        Des déflagrations se produisaient toujours dans le bloc, le Lt. Luyssen à fait commencer la mise en place d’un barrage de poutrelles dans le sas de la galerie et après avoir consulté le Cdt, a décidé d’abandonner le C2.

                        Les charges de TNT ont été placées et le Lt. Modave m’a envoyé à la caserne, le brigadier Denis est mort le lendemain à l’infirmerie.

                        Hollart Joseph, servant du FM et également du 47 faisait partie de l’équipe de repos lors de l’attaque de C2.

                        Témoignage du Lt. Luyssen, officier de tir :

                        Le Cdt. m’a envoyé au bloc, au pied de l’escalier j’ai rencontré l’équipe du C2 commandée par le Mdl. Lorent.

                        Je lui ai demandé qui lui avait permis de quitter son ouvrage, il a répondu que des explosions s’étaient produites dans sa casemate.

                        Je lui ai demandé s’il avait son personnel au complet, il a compté et a constaté deux manquants. Je lui ai demandé s’ils étaient morts ou blessés, il m’a répondu qu’il n’en savait rien.

                        Voulant donc leur montrer l’exemple, je leur ai dit que j’irais voir seul puisque eux étaient trop timides !

                        Un soldat milicien m’a dit que j’avais raison et qu’il me suivrait.

                        Arrivé en haut de l’escalier, j’ai trouvé le brigadier Denis allongé immobile sur le palier, comme il avait toute sa connaissance, je lui ai demandé pourquoi il restait là !

                        Il me répondit qu’il ne savait plus bouger, après m’être assuré qu’il n’avait aucun membre brisé, je suis allé voir dans la casemate du 47.

                        Le canon avait été expulsé de son alvéole et était couché sur le flanc, le corps du soldat Straetman se trouvait derrière le canon et avait le crâne défoncé.

 

Le Journal d’Aubel a écrit ceci à son propos le 13/10/1946

REMERSDAEL — On nous écrit : Un héros de chez nous décoré à titre posthume. — Nous ap­prenons que le Ministère de la Défense Nationale vient de décerner à titre posthume au soldat Jos. Straetmans, fils de M. Gilles Straetmans-Levaux du Bois-Rouge, la Croix de Chevalier de l’Ordre de Léopold II, avec Palme, la Croix de Guerre 40 avec Palme et la Médaille commémorative 40-45.

Rappelons brièvement que Joseph Straetmans, mobilisé depuis sept. 1939 au fort d’Aubin, se trouvait au matin du 10 mai, en congé dans sa famille. Il rejoignit son poste sans hésiter et su­bit avec ses camarades de la région, les premiers assauts ces vagues grises. Il tomba à son poste de combat. Une grenade ennemie le frappa en plein combat. Il fut tué sur sa pièce.

Pendant la guerre, son corps fut ramené à Rémersdael et ses camarades de combat le portè­rent au cimetière du village où il repose mainte­nant parmi les siens.

Le Ministère de la Défense Nationale vient de récompenser le héros. Par un arrêté du 6-12-45, S. A. R. le Prince Régent vient de décerner à titre posthume au soldat Straetmans Joseph la Croix de Chevalier de l’ordre de Léopold II avec Palme et la Croix de Guerre 40 avec Palme. Par ailleurs la médaille commémorative 40-45 lui est décer­née à titre posthume par un arrêté du 29-4-46. Dans la citation qui accompagne ces attributions nous lisons: Au soldat Straetmans Joseph, tombé en brave pour la défense des foyers et de l’hon­neur du peuple Belge – signé: Defraiteur.

Nous sommes heureux de pouvoir présenter à cette occasion nos plus vives félicitations aux pa­rents, à son frère qui fit la campagne de 40 et qui fut prisonnier en Allemagne, ainsi qu’à tous ses proches. Rémersdael est fier de son héros. Et le souvenir ce son sacrifice suprême restera vi­vant parmi notre population toute entière.

 

Le 6 juin 1962, le Journal d’Aubel termine ainsi le récit d’une manifestation organisée à Aubel :

C’est toutefois sur une note émouvante que devait se terminer cette nouvelle et solennelle séance de protestation : la lecture par le président d’une lettre adressée à S. M. le Roi par M. Straetmans, bourgmestre démissionnaire de Rémersdael, qui, devant l’inanité de ses protestations, se voyait dans la triste obligation de renvoyer les distinctions honorifiques octroyées à titre posthume à son fils, mort au Champ d’Honneur au Fort d’Aubin-Neufchâteau. Etreinte par l’émotion, ainsi du reste que le président qui en omit de remercier les orateurs, ce dont il s’excuse, l’assistance ovationna longuement M. Straetmans, puis, debout, écouta dans un religieux silence, l’hymne national.

 

Et il donne le contenu de la lettre dans son édition du 9 juin 1962 :

A propos des projets linguistiques

Samedi dernier, au cours du meeting organisé à Aubel, lecture a été donnée d’une lettre adressée au Roi par M. G. Straetmans, bourgmestre démissionnaire de Rémersdael. En voici la teneur :

Sire,

Pour beaucoup de Belges, habitants des Fourons, les paroles que vous avez prononcées le dimanche 27 mai, à Gand, ont été un déchirement nouveau.

Paroles de sagesse et d’apaisement, elles réaffirment ce que tous nous avons toujours considéré comme notre devoir, mais aussi comme notre droit le plus sacré.

Nous voudrions encore pouvoir y croire. Mon fils ainé est tombé, en mai 1940, pour la défense de la liberté de notre pays au fort d’Aubin. Une seule consolation m’était restée : homme libre, il avait offert sa vie pour la défense de la liberté du peuple belge.

Cette pauvre et seule consolation vient de m’être enlevée par le vote de la Chambre et par celui de la Commission du Sénat qui, contre la volonté de 96 pour cent de ses électeurs, rattachent la commune de Rémersdael à la province du Limbourg, et imposent à mes administrés un régime qui n’est pas le leur et dont ils ne veulent pas.

Sire, je prends la respectueuse liberté, avec infiniment de peine, de vous renvoyer les distinctions octroyées à titre posthume à mon fils et qui étaient pour moi le souvenir le plus cher.

Elles me disent trop cruellement que le sacrifice consenti l’a été en vain.

J’ai l’honneur d’être, Sire, de Votre Majesté, le très respectueux et très fidèle serviteur.

Rémersdael, le 4 juin 1962.

Voir aussi à ce sujet le site du Fort d'Aubin.